Fabrice Schurmans
dans un quadrilatère d’immeubles de huit étages
6/4 – Les psychologues s’inquiètent des effets du confinement sur notre santé mentale. Stress post-traumatique, crises de nerf, d’angoisse, de panique. Les autorités et les chercheurs le répètent dans toutes les langues : rester chez soi constitue la meilleure façon de ralentir la propagation du virus. Quand vivre isolé signifie, pour la première fois peut-être, solidarité tant avec son voisin qu’avec l’humanité. Depuis 2018, je n’ai pas perdu mon temps. Je mène une vie en retrait, sortant peu, écrivant beaucoup. Le contexte ne m’avait alors guère laissé le choix. Le chaos derrière, un pas de danse au bord du précipice. Rien devant. Plus de boulot. Plus de raison sociale. Accroché à l’écriture comme le naufragé à son radeau. En porte-à-faux avec le modèle dominant. La société tournait, travaillait, voyageait, se couchait avec la bonne conscience du devoir accompli. Je me demandais si écrire des nouvelles, des romans et des articles critiques comptait pour un métier. Tout travail suppose salaire. Je n’avais donc pas de travail. Conséquence notable de ce repli, à force de vivre dans l’imaginaire et la fiction, l’introversion m’est devenue une seconde nature. Et puis… le confinement global a changé la donne. Selon The Atlantic, il constitue même un répit mérité pour les introvertis, qui posséderaient ainsi un coup d’avance sur les autres. Le virus et ses conséquences libèrent des millions de femmes et d’hommes d’un fardeau. Hourrah ! « Enfin, le monde nous a rattrapés. » Nous ne sommes plus en dehors, dans les marges, en décalage permanent. Il ne faut pas avoir peur. Le désarroi n’a qu’un temps. Dans quelques mois, votre vie reprendra son cours. Et je marcherai seul dans les collines ceignant Coimbra.